Toute la neige tombe sur moi~ [une personne supplémentaire max.]

La ville, de nuit. Des réverbères défectueux, des néons brisés, des vitrines fracturée. Ce n'était pas du tout la vision que j'avais de cet endroit... Dans ma tête, il était toujours animé, partout, même de nuit. Quelques chiens errants me regardaient en coin, l'air peu serein. Pourtant, mis à part un sourire plein de crocs et un regard plus qu'inquiétant, je ne leur avait rien fait du tout. De la mauvaise herbe poussait sur le trottoir. Des drôles d'hommes marchaient sur la route, en zig-zag. C'est ceux que l'on qualifie couremment de "saouls" si je me souvenais bien.

Mais pourtant, il ne devait pas être si tard que ça... Je sortait ma montre de ma sacoche. Neuf heures ving-sept et treize secondes. Quatorze. Quinze. Je fus complêtement happé par la stupide trotteuse qui poursuivait sa route circulaire sa se poser de questions. Bref, neufs heures trente, approximativement. Alors pourquoi la ville se comportait comme après une soirée bien arrosée dans laquelle auraient été conviés tous les habitants?

Le nez en l'air, je remarquai un panneau indiquant le centre. Ah. Ceci explique cela. Donc, j'étais dans la périphérie. Ooh, je venais de me perdre. Même si je n'avais aucun endroit précis où aller, il y en avait certains dans lesquels je n'aimais pas traîner. Je m'engageai dans une ruelle sombre, très étroite. Désormais, en cette nuit d'Hiver, plus grand chose ne troublait le silence, hormais les chansons à boire, lointaines, qui provenaeint du bar croisé quelques minutes auparavant. Puis plus rien, hormis le son de ma canne, régulier et profond, rapidement absorbé par la neige qui commençait à tomber. Elle se mêlait parfaitement à ma chevelure, tiens.

"-Regarde-moi ça. Ils se sont perdus, eux aussi?" Fis-je en les désignant du regard.

Bien entendu, aucune réponse. Je posai des questions seul, régulièrement, et personne alors ne répondait... J'aimais bien la compagnie de Vlad, pare qui lui, au moins, prenanit la peine d'écouter ce que je disais. Ou pas, mais au moins, il m'entendait, et c'était amplement suffisant. Mais une fois loin de se type, j'avais tendanceà flotter dans mon petit monde et à me perdre au premier carrefour qui se présentait.

L'heure avançait. Désormais onz heure, moment où les lumières s'éteignent. J'amais particulièrement cet instant. Pourquoi? Parce que c'est là que les personnes, surprises de l'extinction des feus, ont tendance à s'agiter pour rentrer plus vite. Et, par conséquent, je les ressens mieux.

Justement. J'apperçus un homme, dans le noir. Tant mieux, m'attaquer aux femmes et aux enfants me paraissait un peu déloyal. J'avais beau avoir l'air complêtement ailleurs, je n'étais pas non plus faible, hein. Donc, revenons-en à cet homme. Je me plantai devant lui, nous devions être à peu près à la même hauteur. Il se décala pour continuer son chemin, mais je le bloquai de ma chère canne. Alors, il se rendit compte que je l'arrêtai volontairement, et il s'énerva. Il leva le bras vers moi en jurant, et moi, je me contenatai alors de le aisir par le menton. Je connaissais bien cette technique, je savais qu'elle avait le don de décontenancer les gens.

"-Vous auriez sans doute quelque chose à m'offrir, je présume... Je meurs de soif!" Fis-je avec mon sourire répugnant. Il fit un pas en arrière et me menaca d'un Opinel. La réaction me fit sourire. Je dégainai mon épée, histoire de lui faire comprendre que je ne voulais pas juste rigoler un coup. D'un geste habile que j'avais patiemment appris, celui que l'on surnomme le "coup de pied dans les genoux", je le mis à terre, toujours souriant. Enfin, un coup de cane dans la nuque le fit sombrer dans un sommeil profond pour quelques instants. En voilà encore un qui ne comprendrait pas ce que font ces deux petits trous sur sa nuque le lendemain matin, pensant se réveiller d'une cuite, pensai-je, partant de l'endroit d'un pas léger, un filet de sang glissant sur le bord de mes lèvres.

Enfin, tout ça pour dire que j'était toujours perdu, hein. Je toquai à la vitre d'un bistro dont la lumière était toujours allumée. Une femme de la cinquantaine sans doute m'ouvrait, l'air peu avenant.

"-Encore toi? C'est la troisième fois que tu passes par cette rue, ce soir... Eh, ça va? Tu saignes!"

"-Non. Et puis, on s'en fiche. Je veux savoir où est la demeure Nightray, en fait."

"-Au bout de la rue, prends à gauche, simplement. Enfin, je ne vois pas ce que tu vas faire là-bas, le type qui y vit est mort."

"-Ah bon? Je devrais sortir plus souvent, on ne m'avait même pas informé de mon propre décès... Au plaisir." Conlus-je d'un signe de main masqué par mes manches trop longues.

Une soirée normale, avec en prime une victime. C'était plutôt bien. Même si j'avais envie de profiter un peu de cette neige. Après tout, c'est un phénomène tellement éphémère, la neige. Contrairement à la pluie ou au soleil, ça meurt avec l'Hiver, et je trouvais cela vraiment triste.

Le jardin publique n'avais pas été fermé cette nuit, par flemme sans doute. Je pris place sur un banc un peu décoloré, observant ce qui se passait autour de moi. N'observant rien, en fait.

Hm? Un bruit dans le buisson, accompagné d'une impression familière. Je pris une inspiration. Haha, j'en étais sur, l'autre était dans le coin! Alors que, depuis le temps, la neige s'était accumulée sur ma tête et mes épaules, étant donné la température basse de mon corps sans doute, je secouai la tête. Au moins un kilo de neige en tomba? Ou cent grammes. Ou une tonne, peut-être. Bref. Je n'avais même pas la sensation d'avoir froid, a force de rester ici. Le frappai les flocons de ma canne, tout en me rapprochant de cet arbre à la même odeur que l'autre vampire. Je secouai les branches du bout de la canne, faisant s'abattre la poudreuse qui y était déposée. Tout ça dans le but de bouger un peu le Boogeyman qui s'y était tapi.

Rien? Ah, très bien. Je m'étais peut-être trompé après tout. Enfin, non, j'étais bien sûr de le voir, mais je n'avais pas envie de lui sauter dessus en hurlant son nom telle la fangirl sauvage sur un grand brun ténébreux, exactement comme je l'aurais fait d'habitude. Non, puisque je risquai de lui faire peur. Toujours en silence, comme depuis quelques minutes déjà, je poussai quelques branches avant de sourire.

"-Tu t'amuses bien? Tu n'est pas... Discret."

A moins qu'il ait voulu que je le trouve, mais dans ce cas-là, autant me parler. Ou alors, quelque chose que mon esprit n'était pas apte à comprendre. Alors je restai planté là, un demi-sourire brisant la tache de sang coagulé sur mes lèvres, à fixer les flocons stupides qui continuaient à danser. Personne ne sortait par un temps pareil, à ce que je voyais, sauf deux Vampires assez bizarres pour s'y risquer. Bah, bizarre n'est pas péjoratif, pour moi.

Vlad m’observait avec insistance, comme sans doute depuis que j'étais assis ici. Il fixait mon oeil, mon unique oeil, ce qui me mit un peu mal à l'aise, sans trop perturber mon air rêveur. Personne ne savait, du moins personne en vie, qu'il avait disparu. Où? aucune idée. Bah... Remarque, c'était peut-être très bien comme ça. Je m'accroupis face à lui, souriant. C'était amusant comme situation, comme si j'avais trouvé un pauvre petit vampire perdu, à la différence près que celui-ci, je l'aimais.

"-Au fait, c'est à mon tour si je me souviens bien. Puisque tu ne m'avais pas demandé mon avis..."

Lui dis-je d'un ton faussement contrarié. je le saisis par la nuque et l'attirai à moi, exactement comme lui l'avait fait. Bizarrement, l'embrasser me causait une drôle d'impression. Un peu comme euh... Un voyage à sugar-land? Enfin, un truc dans le genre. Je me décollai de lui, et souris.

"-Je devais te rendre la pareille... Très cher collègue."

Haha, ce Vampire était vraiment trop simple à impressionner. enfin, pas que ça me gène, au contraire, cela m'amusait, plutôt. Comme pour accompagner le silence qui s'était installé, peut-être pour le rythmer... Ca se rythme, un silence? Je frappai les flocons d'une manière régulière, comme pour battre une mesure qui n'existait que pour moi. Tout ça pour laisser le temps à l'autre de se reprendre un peu, avachi dans son sapin à fixer le vague.

- Hé bien, ça vaut le coup de t’espionner.

"-Ca vaut le coup de te trouver aussi, je te ferais dire. Je te remercie d'être si peu discret.Lui répondis-je en lui renvoyant son sourire. D'ailleurs, il ne devait avoir aucune raison valable pour me suivre, mais bon.

"-Dans tous les cas, je suis rassuré, tu n'es pas mon addiction. Et excuse moi pour le goût d'alcool, ce n'est pas de ma faute..." C'était tout moi, ce genre de remarque, mais quoi de plus normal qu'être soi-même...

Je ne fis aucune remarque sur le sang enfantin qu'il m'avait fait goûter. J'étais sûr que, quelque part, il avait des remords à tuer quelque chose d'aussi fragile. Et c'était la raison pour laquelle j'avais tendance à m'attaquer soit aux alcoolisés, soit aux poches de sang. Un sourire narquois ne dessina sur mes lèvres en repensant au pauvre type qui devait toujours être sous la neige à baver.

Je m'étirai de nouveau de toute ma longueur. Ce sourire me collait toujours. La satisfaction de l'avoir scotché, sans aucun doute. Héhé. Je voyais bien que lui aussi avait envie de se jeter sur moi, à en juger par son regard. Alors je posai ma canne par terre, enfin, il serait plus juste de dire que je la laissai tomber. Je n'aimais pas avoir les bras ballants, et surtout en la présence de Vlad, alors pour les occuper, je me contentai de le prendre et de le plaquer contre moi. Nez--à-nez avec lui, souriant, toujours, sous le grand sapin du parc désormais blanc.

Le silence qui jusqu'alors était troublé par nos paroles reprit son droit. La danse des flocons se fit plus lente, à mesure que les nuages passaient. Je ne ressentais désormais plus du tout le froid, et pas seulement parce que je n'y étais pas sensible. Au fond de la rue, les réverbères clignotèrent puis s'éteignirent, rapidement suivis de leurs voisins du parc. Moi qui avait mauvaise vue dans le noir... Enfin, tant pis.

J'avais désormais les deux mains au milieu de son dos, couvertes de mes manches trop longues. Peu de neige tenait encore dans mes cheveux, et elle se faisait quasi-absente sur mes épaules. Je frissonnai légèrement. Je devais m'être tu un peu trop longtemps peut-être à détailler ce paysage qui m'entourait ainsi que la situation dans laquelle nous nous trouvions.

Alors, rapidement, je décollait mon nez du sien. Dans ma légèreté habituelle, je m'adossai à l'arbre et m'assis sur le tapis d'herbe morte, genoux contre le torse, menton appuyé sur les bras.

"-Avoue que tu y as crû un instant. Désolé, j'avais trop envie de t'embêter... Enfin, tu pouvais t'y attendre."

Ce devait être mon instinct qui m'avait commandé de faire ça. Mon instinct stupide mais efficace. Je sentais bien la déception, quelque part, que j'aie agi comme cela. Ou pas, peut-être, je ne suis pas empathique...

"-Bon, excuse-moi. Si tu n'y vois aucun inconvénient..."

Je tendis la main, ou plutôt la manche, pour me saisir de la sienne et le tirer à moi. Le but étant évidemment qu'il ne me boude pas. Et aussi accessoirement parce que j'adorais ça. Peut-être qu'on avait l'air de deux fous sous ce temps, mais bon, je n'étais pas tout à fait équilibré non plus, alors...

Cette fois-ci, au moins, j'étais sûr que son poids m'empêcherait de m'enfuir de nouveau. Je pris le temps de farfouiller dans ma poche, et souris.

"-Tu veux un bonbon?"


[Limite que j'a tout fait pour faire court ._ .]

Qu'il était énervant, lui. Je n'avais pas du tout envie de lui obéir, je ne pouvais pas m'imaginer sans sucreries. Sans chocolats, Bêtises, orangettes, macarons, etc. L'une de mes délicieuses raisons de vivre.

L'autre s'était de nouveau assis face à moi. Je l'observai de ma moue de gosse contrarié, attendant qu'il s'excuse pour avoir insulté mes chers bonbons. Enfin pas vraiment, attendant tout court. Je n'avais rien à faire d'autre que de le scruter. De le scruter pour le plaisir, comme ça. Ce devait être plutôt gênant de se faire toiser par un seul oeil. Quoiqu'il n'en savait rien.

Cette absence d'oeil m'avait toujours gêné, bien que personne ne s'en soit rendu compte avec mon attitude toujours si euphorique. J'étais passé maître dans l'art de l'attitude de façade, d'ailleurs. C'était bien utile de ne pas se montrer tel qu'on est, mais la plupart du temps, quand les gens s'en rendaient compte, ils nettaient tout en oeuvre pour s'éloigner de ma personne, des fois de manière peu courtoise. Seul Boogey avait du se rendre compte de ce fait, que j'omettais beaucoup de choses quand je parlais, sans pour autant vouloir que je lui dise tout, sans me forcer à quoi que ce soit. Pour ça, je lui étais reconnaissant, bien que ça n'excuse pas le fait qu'il ne voulait pas de sucreries.

Je me levai en m'aidant de l'arbre enneigé, de toute ma petite hauteur. J'avais toujours cette expression de gosse, et j'étais à la limite de lui tourner le dos et de bouder, ce que je ne faisais pas juste pour contredire ce qu'il pensait.

Bien, alors, puisque mon offre de Vampire diabétique ne t'intéresse pas...

Je posai le bout de ma canne sur son front et le poussai un peu.

...Je vais te laisser te mordre les doigts de m'avoir fait partir.

Lui dis-je sur un ton presque désagréable, un grand sourire aux lèvres. Puis, je fis rapidement volte-face, esquivant de justesse le tronc d'arbre. Je repaissai dans le terrain balayé par la neige, et m'y enfonçai. J'étais reparti pour errer dans cette grande ville...